L’hygiène, autrefois

Ou, comment être propre sans eau :

Dans l’antiquité et jusqu’au moyen-âge, les odeurs du corps étaient « effacées ou atténuées » par des frottements et des parfums : frictions et ablutions sont alors les deux rituels sacrés en France. Pour pallier à la puanteur du corps sale, le renouvellement du linge par sa blancheur, sa matière, son esthétique, devient une règle et permet d’éclipser toutes ou parties des mauvaises odeurs. On n’hésite pas à agrémenter le « ressenti d’hygiène » par le poudrage des cheveux (qui en évite le lavage en en conservant la souplesse), le choix des dentelles qui ont la particularité de retenir les parfums dans les méandres de leurs arabesques, le rinçage de la bouche avec de la cannelle qui assurera un certain temps la fraîcheur de l’haleine, l’usage immodéré du parfum qui « recrée merveilleusement le cerveau » , des sachets d’herbes ou fleurs séchées placés sous les aisselles ou sur les hanches, glissés dans des plis de robe ou les revers des pourpoints……………… Tous ces artifices permettent de sauver la face mais après les ébats amoureux, les surprises devaient être de taille.

L’arrivée des salles de bains :

Un objet inédit apparait, après 1740 chez les nobles : « la chaise de propreté ». Plus tard baptisée « bidet ». Fin du XVIIIème, ce sera la naissance des cabinets de toilettes, ancêtres de nos salles de bains. Ces aménagements et innovations prouvent que l’usage de l’eau pour l’hygiène corporelle semble être une des préoccupations de nos ancêtres Il est bon de rappeler que, déjà sous Louis XIV, les baignoires existaient au palais de Versailles. Dans la salle de bain royale, 2 baignoires en bronze sculpté existaient : une servait au trempage et lavage et la seconde au rinçage. Le Roi ne se baignait pas nu mais dans une sorte d’ample chemise qui lui évitait de se brûler les bras sur les bords de baignoire trop chauds pour sa chair délicate. Les salles de bains ne deviennent réellement à la mode que sous Louis XVI, avec des cuves en cuivre et des baignoires sabots, et dès 1770, les premières copies des baignoires royales en tôle popularisent l’usage de cette nouvelle mode d’hygiène. Toutefois, on se baigne encore souvent dans les rivières, à côté des bateaux-lavoirs, en tenue d’Eve, à la grande indignation de certains et certaines qui critiquent cette pratique. Il faudra la création de bateaux « toués » abritant les baigneurs des regards indiscrets pour qu’enfin, les gens puissent s’adonner à leur toilette favorite. Mais ce n’est qu’au XIXème siècle que le bain devient une pratique usitée : bain frais pour son action tonique, bain tiède procurant calme et bien être, bain chaud en thérapie……… Le développement des adductions d’eau publique à Paris permet la multiplication des bains publics (125 à Paris en 1850). A la même date, 950 000 parisiens prennent plus de deux millions de bains, soit une moyenne de 2,23 bains par habitant et par an…………. Hygiène, vous avez dit hygiène ????

L’hygiène buccale :

Jusqu’au Moyen-Age, les dents sont très rarement frottées mais quand c’est le cas (dans les milieux nobiliaires) elles sont nettoyés avec les doigts mais aussi avec un cordon de soie (l’esguillette), ancêtre du fil dentaire existant encore aujourd’hui. C’est au XIVème siècle qu’apparaissent les premiers cure-dents fabriqués. La brosse à dent n’apparaitra en Chine qu’en 1498, mais il faudra attendre le XVIIème pour qu’elle soit introduite en Europe. Jusque-là, on se rince la bouche avec « une soupe de vin », voire de l’urine dont l’usage attesté depuis la civilisation romaine disparaitra définitivement au XVIème siècle. On peut comprendre que les mauvaises dentitions étaient monnaie courante en ces périodes-là.
Il faut attendre la Renaissance pour que l’hygiène buccale se développe afin d’éviter la fétidité de l’haleine et la perte prématurée des dents. Les premières poudres dentifrices, les eaux parfumées rafraichissantes, les cure-dents (mais aussi cure-oreilles et cure-ongles) envahissent les boutiques spécialisées. Toutefois, malgré tous ces progrès, le sourire n’apparait pas encore dans l’éventail de la séduction. C’est à partir du XVIIIème siècle que la brosse à dents se démocratise réellement mais que les médecins hygiénistes recommandent les gargarismes et le frottage systématique des dents à l’eau après chaque repas. Dans les couches populaires les bouches ne sont malheureusement que rincées et les sourires des enfants laissent apparaitre de très nombreuses caries.

L’hygiène capillaire :

Au début du VIIème siècle, Saint Colomban insiste dans ses monastères sur l’importance du nettoyage régulier des cheveux : c’est pourquoi, pour éviter la vermine et en simplifier l’entretien, les ecclésiastiques prennent l’habitude de se les raser. Mais, en dehors des congrégations religieuses, les cheveux sont peu soignés. Les chapeaux les enferment et les cachent, couverts de parasites qui sont considérés comme un dérèglement des humeurs (lié à l’alimentation) plus que comme une preuve de saleté. Et face à la vermine quotidienne, l’épouillage familial n’est pas rare, à l’instar des singes aujourd’hui.

C’est pour cacher son crâne chauve qu’Henri III met la perruque à la mode au XVIe siècle, mais le soin apporté aux perruques n’empêche pas les poux d’y proliférer. Si la mode des perruques s’estompe au XVIIIe siècle, il faut attendre le XIXe siècle pour que l’on recommande de savonner fréquemment le cuir chevelu, au jaune d’œuf ou à l’huile d’amande douce. Comme ces recommandations sont peu suivies d’effets, on conseille surtout de couper les cheveux très courts pour éviter poux et teignes. Ce n’est que depuis quelques décennies que les cheveux sont lavés régulièrement et avec d’autant plus de soins que leur aspect négligé et sale est immédiatement décelé.

JD. Birebont, octobre 2008

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Le christianisme, le clergé

Fra Angelico, XIVe siècle, Couvent de St Marc, Florence

Le christianisme nait dès le 1er siècle après Jésus-Christ, en Palestine. Cette nouvelle religion est fondée sur l’Amour et la Fraternité des hommes. Au départ, simple secte dérivée du judaïsme palestinien, elle est tolérée en tant que telle par les autorités romaines. Beaucoup de gens adhèrent très rapidement à cette philosophie et se convertissent au christianisme. Mais les Romains pensent que Jésus de Nazareth, né à Bethléem, représente un danger pour eux, ils l’arrêtent et le crucifient. Les chrétiens seront alors pourchassés et persécutés et leur religion sera interdite jusqu’en 313 où l’Empereur Constantin mettra fin aux persécutions puis, dès la fin du IVe siècle, le christianisme devient la religion officielle de l’Empire.

Le premier souverain de Gaule à se convertir par opportunisme plus que par la foi fut Clovis (466/511). Le catholicisme devient en France la principale religion, décrétée « religion d’Etat », fille aînée de l’Eglise, et les rois de France étaient appelés « rois très chrétiens ». Mais déjà, en 431, Nestorius évêque de Constantinople produit une des premières fissures du christianisme entre l’église Byzantine de l’ouest et l’église Assyrienne de l’est.

Le concile de Chalcédoine est le 4ème concile œcuménique et aura lieu dans un quartier chic de la ville d’Istanbul réunissant 343 évêques en 451. L’évêque de Rome, Léon de Grand, pressentant le danger, refuse d’accepter le titre de « Nouvelle Rome » à Constantinople car cela aurait accordé de ce fait la primauté de cette ville sur tous les autres patriarcats. Cela déclenchera le « Grand Shiisme » d’Orient de 1054, lutte de suprématie entre Rome (catholique) et Constantinople (orthodoxe).

Ce problème réglé avec l’Orient, un autre « Grand Shiisme » d’Occident celui-ci, au XIVe siècle, secouera l’église catholique car il oppose dès 1378, les papes concurrents qui s’entredéchirent pour conserver la suprématie et le pouvoir absolu en Occident. De par le monde, de nombreuses dissidences se créent dans l’église catholique et dès le XVIe siècle naissent des courants plus ou moins influents : les anabaptistes, les mennonites, les luthériens, les baptistes, les unitariens, les pentecôtistes, les méthodistes, les anglicans, les calvinistes, les presbytériens……………. Rome longtemps la place réservée de la Papauté, laissera un temps sa place à Avignon qui sera du temps de Bertrand de Got (1264/1314), dit Clément V, le siège de cette même papauté, autorité suprême de l’Eglise catholique.

Dans l’Europe du XIe au XIIIe siècles, la religion chrétienne et l’Eglise sont omniprésentes. Le « Moyen Age Médiéval » est marqué par le renforcement du pouvoir du pape et du clergé. L’encadrement des croyants de l’Eglise se fait jusque dans les évènements importants de leur vie privée (naissances, baptêmes, mariages, décès). Tous les récalcitrants ou dissidents sont sévèrement punis avec le soutien du pouvoir politique. Le pape n’a de cesse que de renforcer son pouvoir face aux grands souverains européens. Ces derniers ne contestent pas le rôle du souverain pontife mais en revanche, ils veulent garder comme prérogative le fait de pouvoir nommer les évêques. Il en résulte que, nommés par les souverains, les grands évêques étaient plus proches du pouvoir impérial que de celui du pape et, par conséquent, avaient un poids non négligeable dans la nomination des papes.

A partir de 1059, l’élection pontificale est faite par les cardinaux. Le nouveau pape Grégoire VII (1073/1085) décide ainsi de renforcer le pouvoir de l’Eglise. Il décide aussi, de nommer lui-même les évêques et faire en sorte que l’Eglise catholique soit totalement dirigée par Rome. Henri IV, empereur germanique, ne l’entend pas de cette oreille et en 1076 et fait comprendre au pape qu’il abuse de la situation. Il faudra attendre 1122 pour que cette question se règle par le « compromis de Worms » qui permet aux souverains de garder l’investiture temporelle (ils proposent des noms) alors que le pape garde l’investiture spirituelle (la nomination).

Grégoire VII envisage de réformer l’Eglise en profondeur et surtout supprimer les abus de certains membres du clergé. En effet, l’Eglise s’enrichit grâce à un impôt très lourd : la dîme. Il est courant que les Grands Prélats vivent dans l’opulence voire le luxe entouré de courtisans et de……………courtisanes. Grégoire V décide de modifier leur mode de vie afin que ces clercs (membres du clergé) se rapprochent des fidèles, favorisent l’expansion du christianisme et, en conséquence, contribueront à maintenir la paix et la justice sociales. Il s’oppose fortement au mariage ou concubinage des prêtres ce qui lui vaut une certaine animosité ambiante.

Le clergé est divisé en deux groupes : le clergé séculier (archevêques, évêques, prêtres, religieuses) directement en contact avec les fidèles et le clergé régulier qui vit généralement dans des monastères (abbés, moines, moniales). Mais au XIe siècle, ce sont les Ordres prônant la pauvreté qui ont le plus grand succès. De nombreux croyants veulent un retour vers un christianisme plus proche de la pauvreté et du dénuement du Christ (débat très important et clivant au sein de l’Eglise). En 1098, Robert de Molesmes quitte une abbaye cistercienne pour fonder l’ordre de Cîteaux (en Bourgogne) : silence, pauvreté, austérité, prières régulières, simplicité de la vie quotidienne, travail manuel……. Mais, malheureusement, ces grands ordres monastiques deviennent peu à peu, de grands propriétaires terriens et s’éloignent rapidement de leur vocation première : ils deviennent riches, des seigneurs à leur tour, font travailler les paysans et leur prélèvent la dîme. Leurs abbés sont souvent des nobles et se rapprochent du pouvoir politique. Ils se couperont des populations et seront plus ou moins rejetés par les fidèles.

Au XI et XIIe siècle, les populations sont très croyantes. Cependant, là aussi, la manière de concevoir la religion est différente entre les élites et la base populaire. Les élites ont une meilleure éducation chrétienne et respectent le dogme religieux. Ces élites intellectuelles, essentiellement des clercs, lisent les textes sacrés et les ouvrages de références. A contrario, 95% de la population est analphabète et n’a qu’une éducation religieuse sommaire donnée par des prêtres qui ne sont pas tous très lettrés. Les croyances populaires sont également souvent polluées de superstitions (sorcières, diables, fantômes) et de la peur d’aller en enfer. Les populations multiplient les rites, les prières, les signes religieux pour sauver leur âme et aller au paradis. Alors, pour ne pas avoir à choisir qu’entre l’enfer et le paradis, l’Eglise crée au XIe siècle le purgatoire, un lieu où les âmes pécheresses séjourneront le temps de se faire pardonner quelques péchés véniels et ainsi mériter le pardon divin et rejoindre finalement le paradis.

Le clergé regroupe ses croyants dans une paroisse, qui correspond aujourd’hui à un village. Les paysans sont ainsi pris entre deux feux : d’un côté l’Eglise et de l’autre le seigneur. On parle d’encellulement et les ruraux sont enfermées à vie dans un système qui les oppresse et ne peuvent en sortir : ils y naissent, y font leur communion, s’y marient, y procréent, puis y meurent.

L’Eglise et son clergé renforcent leur pouvoir mais rejettent et veulent éliminer les autres formes de religion ou de religiosité. Les croisades en sont la forme la plus caractéristique. Véritables pèlerinages armés, elles visent à reconquérir des territoires chrétiens perdus ou menacés. Saint Augustin (un des Pères de l’Eglise) définit ces croisades vers la Palestine et Jérusalem de « guerres justes et saintes ». En réalité, elles n’ont qu’un but : l’expansion du christianisme et la suprématie de l’Eglise. La première croisade a lieu en 1099 pour aller défendre les chrétiens byzantins menacés par des Turcs seldjoukides. Le pape veut instaurer la « Paix de Dieu » mais en réalité, il éloigne les seigneurs qui se querellent en permanence, pour les envoyer conquérir les « lieux saints » et leur promet la rédemption de leurs péchés et le salut de leur âme. Des ordres de moines soldats sont créés : templiers, chevaliers teutoniques……………Plus près de chez nous, une croisade aura lieu sur la péninsule ibérique pour reconquérir les territoires toujours occupés par les musulmans qui capituleront définitivement en 1492 avec la chute de l’Emirat de Grenade.

L’Eglise veut évangéliser les derniers territoires d’Europe du Nord et de l’Est encore païens. Elle ordonne aux chevaliers teutoniques de réduire les dernières zones de paganisme et conquièrent de vastes territoires. Les « ordres mendiants » vivront pauvrement au contact des populations pour finir de les évangéliser.

L’Eglise veut réprimer les derniers foyers de dissidence religieuse mais certains d’entre eux n’hésitent pas à l’affronter : les Vaudois à Lyon, les Cathares dans le Languedoc, les Albigeois dans le Centre……. Le pouvoir politique s’en mêle et les seigneurs du Nord mêlés à certains du Sud affrontent les dissidents Cathares (ou certaines communautés juives) qui seront capturés et exécutés sans autre forme de procès.

Pour rétablir le dogme chrétien et une foi orthodoxe (conforme à la règle) l’Eglise créera les « tribunaux de l’inquisition » au milieu du XIIIe siècle qui sont des tribunaux chargés de la lutte contre les hérétiques mais aussi de leur conversion.

Bien plus tard, en 1801, Napoléon œuvrera pour réconcilier les révolutionnaires et le clergé, établir le Concordat par lequel l’Etat subventionne non seulement le catholicisme mais aussi le judaïsme et les bandes luthériennes et calvinistes (protestantisme). Face à l’opposition croissante des groupes anticléricaux, mécontents de l’emprise et de l’influence de l’Eglise catholique dans l’éducation et la politique, la Troisième République fit une série de réformes qui réduisit cette influence malgré les virulentes protestations des groupes cléricaux qui voulaient garder toutes leurs prérogatives (Ultramontanisme).

En 1905, la loi sur la séparation des Eglises et de l’Etat enlève leur statut spécial aux 4 religions d’Etat mais leur laisse l’utilisation gratuite des bâtiments cultuels dont elles avaient été dépossédées pendant la révolution de 1789.

JD Birebont, novembre 2008

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Les roturiers

Roturier, du latin ruptarius, celui qui brise la terre. La roture est un terme générique pour désigner l’ensemble des roturiers, c’est-à-dire des personnes non nobles, en tant que classe sociale inférieure. Le terme roture est souvent employé dans un sens péjoratif.
Les roturiers étaient primitivement les serfs attachés à la glèbe. Puis on désigna sous l’Ancien Régime en France par ce nom de roturiers, les bourgeois vivant de leurs biens et de leurs charges quand ils en avaient, les artisans, les laboureurs, les manouvriers, les brassiers : en un mot, tous ceux qui n’étaient ni nobles ni ecclésiastiques.
Les roturiers ne pouvaient arriver ou que très rarement aux grades supérieurs dans l’armée. Ils payaient seuls la taille et les accessoires de la taille (taillon, crue d’aide (1)….) et étaient également seuls à être soumis à la corvée, à la milice……………. Les lois pouvaient être différentes pour les nobles et les roturiers. Ainsi, pour certains crimes, le roturier était condamné à être pendu mais le noble lui, était décapité.
Le roturier ne pouvait sortir de sa situation et être anobli qu’en obtenant du roi des lettres de noblesse, ou en achetant des charges et des offices qui conféraient la noblesse. La situation financière de certains bourgeois enrichis dépassait parfois largement celle de petits nobles. Il y avait des terres roturières qui pouvaient même appartenir à des nobles et qui étaient soumises à l’impôt.
Dans l’ancien régime, les biens se répartissaient entre biens nobles et biens roturiers :
• le bien roturier par excellence était la censive, une propriété foncière (pouvant être aux mains d’un noble) qui devait un cens à son seigneur direct
• le bien noble par excellence était le fief; sa possession, y compris par un roturier, nécessitait l’acte de foi et hommage (promesse de fidélité envers le seigneur dominant sous peine d’être dessaisi du bien) et donnait la qualité de seigneur.
Il était de rigueur autrefois pour les monarques et les héritiers des familles royales de se marier avec d’autres royaux, ou au moins des nobles prééminents et riches. Or, plusieurs membres des royautés d’Europe se marient désormais avec des roturiers. Les actuelles reines Silvie de Suède et Sonia de Norvège, de même que les épouses des princes héritiers d’Espagne (Letizia) du Danemark (Mary) des Pays-Bas (Maxima) de Norvège (Mette-Marit) ou encore d’Angleterre (Camilla)……….
Le mot roturier n’est guère plus usité de nos jours, même dans les pays où une noblesse existe encore, hormis au Royaume-Uni (commoner).
JD. Birebont, septembre 2008

(1) Le taillon est un nouvel impôt institué en 1549 par le roi de France Henri II

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Confiscation des biens du clergé


Déjà avant la Révolution les finances royales sont dans un état catastrophique avec une dette évaluée entre 4 et 5 milliards de livres et la moitié du budget royal sert à résorber la dette qui ne fait qu’augmenter et à servir de rente pour diverses personnes. Le risque de banqueroute est grand et il faut de l’argent ; le député Talleyrand propose l’idée de confisquer les biens du clergé (et non pas de les nationaliser car aucune indemnité n’a été versée en échange.). C’est ainsi que le 2 novembre 1789, l’Assemblée Nationale Constituante décide que tous les biens du clergé seront « mis à disposition de la Nation ». Ces biens seront dorénavant des biens nationaux, destinés à être mis aux enchères pour remplir les caisses de l’État.
Cet apport de patrimoine, évalué entre 2 et 3 milliards de livres1, constitue un gain considérable pour les finances publiques. La mise en vente est confiée à la Caisse de l’Extraordinaire créée le 19 décembre suivant et définitivement organisée le 6 décembre 1790.
La vente de tant de biens prend du temps, au minimum un an. C’est un délai beaucoup trop long, les caisses de l’Etat sont alors vides et la faillite arrivera bien avant que tout ne soit vendu.
C’est ainsi qu’est décidé de créer, le jour même de la création de la Caisse de l’Extraordinaire, des billets dont la valeur est assignée sur les biens du clergé. L’assignat est né.

Le fonctionnement de l’assignat est simple : comme il est impossible de vendre tout de suite les biens du clergé, des billets seront émis, qui représenteront la valeur de ces biens. Toute personne qui désire acheter des biens nationaux doit le faire avec des assignats, il faut donc avant tout que les particuliers achètent des assignats auprès de l’État, c’est ainsi que la rentrée d’argent se fait. Une fois la vente effectuée, de retour dans les mains de l’État, les assignats doivent être détruits. Ainsi, la rentrée d’argent frais est bien plus rapide que s’il fallait attendre que les biens soient véritablement vendus.
Les premiers billets émis ont une valeur de 1 000 livres. Une valeur si importante ne les destine pas à servir de billets pour la population, mais à être thésaurisés par des particuliers, leur but étant uniquement de faire rentrer tout de suite de l’argent dans les caisses de l’État. La valeur totale de la première émission sera de 400 millions de livres.
L’idée est loin de faire l’unanimité au sein de l’Assemblée nationale constituante, certains rappelant la banqueroute du système de Law. C’est ainsi que des députés comme Talleyrand, Condorcet ou encore Du Pont de Nemours sont entièrement contre. Pour eux, le problème majeur de l’émission d’assignats est qu’il ne faut pas qu’il y ait plus d’assignats en circulation que la valeur des biens nationaux. Or, à cette époque, les billets sont facilement falsifiables. Il y a donc un fort risque de retrouver en circulation une quantité bien plus importante d’assignats que ce qu’il doit véritablement y avoir, et par ailleurs les assignats émis par les faux-monnayeurs n’apporteront pas de revenus à l’État. Dans un tel cas, les assignats ne vaudront plus rien.
Dès le début de 1790, les premiers ratés surviennent. Le 30 mars, Anne –Pierre de Montesquiou-Fezensac déclare au sujet des assignats que c’est « le plus coûteux et désastreux des emprunts ».
Le 17 avril, l’assignat est transformé en un papier-monnaie. Et l’État, toujours à court de liquidités, l’utilise pour toutes ses dépenses courantes. La machine s’emballe… L’État ne détruit pas les assignats qu’il récupère ; pire, il imprime plus d’assignats que la valeur réelle des biens nationaux. Jacques Necker, alors ministre des finances, résolument contre la transformation de l’assignat en papier-monnaie, donne sa démission en septembre.
L’assignat perd 60 % de sa valeur de 1790 à 1793.
Bien que l’assignat voie sa valeur réduite, les enchères des biens nationaux restent tout de même très élevées et seules les personnes aisées peuvent les acheter. C’est ainsi que certains s’enrichissent énormément et achètent d’immenses terrains et bâtiments pour presque rien, en comparaison de leur valeur réelle. La surévaluation légale de l’assignat permet d’acheter des biens par conséquent sous-évalués.
Pour soutenir l’assignat, plusieurs lois successives sont votées, toujours plus dures, comme la fermeture provisoire de la Bourse de Paris (décret du 27 juin 1793) et la fin de la publication des taux de change en 1793, de manière à limiter la spéculation, mais aussi de lourdes amendes et de graves peines d’emprisonnement pour toute personne surprise à vendre de l’or ou des pièces d’argent ou traitant différemment la monnaie de papier et les métaux précieux, ce qui comprend le refus d’un paiement en assignat. Le 8 avril 1793, la Convention décide que les prix de tous les achats et marchés conclus avec l’État seront stipulés uniquement en assignats, mesure étendue le 11 au secteur privé.
Dès les premiers jours de la Terreur, le 8 septembre 1793, la non acceptation de l’assignat est déclarée passible de la peine de mort, les biens sont confisqués et le délateur récompensé. Le 13 novembre 1793, le commerce au moyen des métaux précieux est interdit. En mai 1794, toute personne qui aurait demandé en quelle monnaie le contrat serait conclu doit être condamnée à mort.
Malgré tout cela, les pouvoirs politiques ne savent pas faire face à la crise économique qui arrive et l’État continue d’émettre de plus en plus d’assignats, pour financer la guerre. Le nombre d’assignats fabriqués correspond à une valeur de 2,7 milliards de livres en septembre 1792 et 5 milliards en août 1793. Au début de 1794, les assignats émis passent à 8 milliards. Toutefois, les autorités ont fini par comprendre que la dépréciation continue des assignats était due à l’excès des émissions. Aussi une partie est-elle retirée de la circulation à partir de 1793 au moyen de l’emprunt forcé. En retranchant les sommes rentrées et brûlées, il n’en reste en circulation que 5 milliards et demi. En juin 1794, la création d’un nouveau milliard d’assignats, d’une valeur allant de 1000 francs à 15 sous, est décrétée, dans le même temps qu’un emprunt forcé sur les riches de 100 millions est lancé par le comité des finances. Après de nouvelles émissions, les assignats mis en circulation passent de 10 milliards en août 1795 à près de 45 milliards de livres en janvier 1796, alors que la somme totale des assignats n’aurait jamais dû dépasser les 3 milliards, valeur des biens du clergé. La cause de l’inflation réside dans la surproduction des assignats, le contrôle des prix ne permettant pas de baisser ceux-ci mais ayant pour effet de créer la pénurie.
Un grand nombre de faux assignats, fabriqués en Belgique, en Hollande, en Allemagne, en Suisse et en Grande-Bretagne, avec la complicité du gouvernement britannique, alors le plus grand ennemi de la France, intéressé à accélérer la crise économique française, ont inondé la France.
Sur décision du Directoire, l’assignat est finalement abandonné avec faste lorsque les planches à billets, les poinçons, les matrices et les plaques sont brûlés en public place Vendôme, le 30 pluviôse an IV de la République (19 février 1796)
Le 18, l’assignat est retiré de la circulation contre un nouveau billet : le mandat territorial. L’échange se fait sur la base de 30 francs assignat contre 1 franc mandat, au lieu de 300 contre 1, sa valeur réelle, ce qui condamne le nouveau titre dès son émission. Le mandat territorial connut plus ou moins la même histoire que l’assignat, sa dépréciation se fit bien plus rapidement que pour son prédécesseur. Le 4 février 1797, il fut retiré de la circulation et la monnaie sonnante et trébuchante reprit sa place.
L’assignat est généralement considéré comme un pur échec. Cependant, sa création a non seulement empêché la faillite quasi immédiate de l’État français mais contribué à la réduction de la dette et permis de trouver l’argent nécessaire au financement de la guerre dans les heures difficiles de l’an II.
L’impuissance du gouvernement à combattre l’inflation par des sanctions toujours plus lourdes illustre, pour l’économiste Thomas DiLorenzo, le caractère néfaste d’une politique de contrôle des prix.
On peut donc dire des assignats qu’ils furent économiquement un échec. Jacques Bainville, écrivain et historien royaliste, explique ainsi dans son Histoire de France que la révolution française avait aggravé la crise financière par laquelle elle était née. Politiquement et socialement, les assignats permirent un massif et large transfert de propriété en un temps très réduit. Surtout, les assignats attachèrent au nouveau régime tous les acquéreurs de biens nationaux qui redouteront désormais le retour de la Monarchie.
Le peu de difficultés à imiter cette monnaie (la papeterie était à Jouy-sur-Morin, avec la présence de surveillants du timbre) fut en quelque sorte un encouragement aux faussaires, aussi en fabriquait-on un peu partout. D’après des témoignages de l’époque, on trouvait des imprimeries rudimentaires jusque dans les prisons. La plupart des faux étaient assez grossiers et facilement reconnaissables, mais d’autres étaient pratiquement indécelables ; c’était notamment le cas des faux imprimés à Londres. Les ennemis de la République encourageaient en effet l’impression de fausse monnaie ne pouvant qu’entraîner la ruine de la France. L’atelier londonien avait été fondé par des notables vendéens sous la direction du comte Joseph de Puisave et le patronage du duc d’Harcourt. Il produisait à plein rendement, et lorsque vint la déroute vendéenne après la défaite de Quiberon, Lazare-Hoche annonça dans son rapport qu’il avait saisi dix milliards de faux assignats dans les bagages de l’armée vaincue.
À l’époque contemporaine, des faux ont ensuite été fabriqués pour le marché des collectionneurs. C’est ainsi que l’on parle parfois de « vrais faux » assignats (les faux d’époque) par opposition aux faux actuels.

JD. Birebont, septembre 2008

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Acte de naissance de Romain Duranteau

11 novembre 1763 à Listrac, au château Fonréaud,
Acte de naissance de Romain Duranteau, fils de Joseph avocat au Parlement et Juge de Paix de Castelnau et de Pauline de Kater son épouse.

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